Shōshinge – Vingt-cinquième Stance : Shandao – le moment-unique d’une pensée de joie
Shandao – la joie de Shinjin et le cœur de diamant
Introduction
Le Shōshin Nembutsu Ge (正信念佛偈 – le poème sur la croyance véritable dans le Nembutsu) souvent abrégé Shōshinge est un poème long de 30 stances qui est récité tous les jours dans les temples Jōdo Shinshū. Il est extrait du Kyōgyōshinshō (教行信証), l’œuvre majeure de Shinran (親鸞, 1173 – 1262), le fondateur de notre école Jōdo Shinshū.
Dans cette vingt-cinquième stance, Shinran en se basant sur Shandao décrit l’importance de Shinjin en tant que « moment-unique » d’une pensée de joie, nous faisant devenir l’égal de Maitreya, le futur Bouddha.
Vingt-cinquième stance du Shōshinge – Traduction
[« Quand le pratiquant entre dans l’océan de la grande sagesse du Vœu Primordial,]
(25) Il réalise le recueillement correct qui est le cœur de diamant,
行者正受金剛心 – Gyō ja shō ju kon gō shin
Alors atteignant le « moment-unique » d’une pensée de joie,
慶喜一念相應後 – Kyō ki ichi nen sō ō go
Il devient l’égal de Vaidehi et obtient les trois Sagesses,
與韋提等獲三忍 – Yo I dai tō gyaku san nin
Et réalisera la félicité éternelle qu’est la nature de la Loi.
即證法性之常樂 – Soku shō hos shō shi jō raku
Vingt-cinquième stance du Shōshinge – Commentaire : Shandao – la joie de Shinjin et le cœur de diamant
Pour Shinran, lorsque nous nous en remettons entièrement à la Compassion et la Sagesse Infinie représentée par le Bouddha Amida, nous sommes pleinement en accord avec ses vœux et obtenons Shinjin qui est comme le diamant. Cette réalisation, qui correspond à la prise de conscience que cette Compassion et Sagesse sont accessibles pour nous à tout moment et qu’il nous suffit de nous en remettre à elle, s’accompagne d’une joie immense.
Ce cœur de diamant, qui correspond donc à une réalisation des bienfaits associés au Bouddha en cette vie, nous faisant spontanément devenir l’égal de Maitreya, est un concept important qui différencie le Jōdo Shinshū des autres écoles de la Terre Pure qui mettent l’accent sur la venue d’Amida au moment de la mort. Ainsi Shinran explique dans une de ses lettres, envoyée à son disciple Zuishin-bo :
Pour répondre à votre question : au moment où une personne entre en contact avec les vœux d’Amida – ce qui correspond au pouvoir autre qui s’offre à nous – et que le cœur qui reçoit le vrai Shinjin et qui se réjouit devient fermement établi en nous, nous sommes saisis [par le Bouddha] et ne serons jamais abandonnés. Ainsi, au moment où elle réalise le cœur qui est comme le diamant, on dit d’elle qu’elle réside à l’étape des fixés dans le vrai et atteint la même étape que le Bodhisattva Maitreya.
Puisque les personnes qui ont réalisé Shinjin qui est vrai et réel sont à la même étape que Maitreya, elles sont l’égal des Bouddha. De plus, tous les Bouddha ressentent une grande joie quand quelqu’un se réjouit en réalisant le vrai Shinjin et ils proclament : « cette personne est notre égal ». Les paroles de joie de Shakyamuni se trouvent dans le Grand-Soutra [de Vie-Infinie] : « celui qui voit, révère, atteint [le Dharma] et se réjouit grandement – cette personne est mon excellent ami proche. » ; ainsi il enseigne que la personne qui atteint Shinjin est l’égal des Bouddha.
De plus, puisque Maitreya est déjà devenu quelqu’un qui est certain d’atteindre la Bouddhéité, on l’appelle Bouddha Maitreya. Ainsi, nous savons que la personne qui a déjà réalisée Shinjin issue du Pouvoir-Autre, on peut dire d’elle qu’elle est l’égal des Bouddha. Tu ne devrais avoir aucun doute à ce sujet.
Il n’y a rien que je puisse faire concernant tes compagnons de pratique qui disent qu’ils attendent le moment de la mort. Ceux chez qui Shinjin est devenu vrai et réel – ce qui est un des bénéfices des vœux [du Bouddha Amida] – ont été saisis et ne seront jamais abandonnés ; par conséquent ils ne dépendent pas de la venue d’Amida au moment de leur mort. Une personne dont Shinjin n’est pas encore fermement établi attend le moment de la mort en anticipant la venue d’Amida. »
Ce moment unique qu’est Shinjin et qui correspond à une pensée unique de joie à l’égard de la réalisation de la Compassion et Sagesse Absolue qui nous entoure s’accompagne pour Shandao de la réalisation spontanée de trois sagesses : « perception de joie (Kinin, 喜忍)», « perception d’éveil (Gonin, 梧忍)» et « perception de confiance (Shinnin, 信忍) ». Ces trois sagesses correspondent respectivement à : l’esprit joyeux issue de Shinjin, au fait d’atteindre la Sagesse du Bouddha et à l’esprit qui s’en remet complètement au Bouddha. D’après Shandao, dans le Soutra des Contemplations, la Reine Vaidehi atteint ces trois sagesses. Ainsi Shinran cite ce passage de Shandao dans le chapitre sur la foi du Kyōgyōshinshō :
Les mots « le cœur se réjouit et on atteint la perception », nous enseignent que le pur éclat de la Terre du Bouddha Amida soudainement apparaît devant soi. Comment pourrait-on s’empêcher de sauter de joie ? Grâce à cette joie, on atteint la perception que toute l’existence est sans-origine. Ce qu’on appelle aussi « perception de joie (喜忍)», « perception d’éveil (梧忍)» et « perception de confiance (信忍)». […] [Ces mots qui furent prononcés par le Bouddha] sont nés de son désir d’amener la Reine [Vaidehi] à souhaiter de tout cœur atteindre ce bénéfice. Quand on désire courageusement et résolument voir [le Bouddha Amida], alors on réalise cette perception. Il s’agit principalement d’une perception atteinte dans les dix étapes de la Foi [de la carrière du Bodhisattva] ; il ne s’agit pas d’une perception réalisée dans ou au-dessus des étapes de la Compréhension et de la Pratique.